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Denis Barthe, à son rythme

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En 2005, alors que le mastodonte du rock hexagonal, Noir Désir, nage en plein marasme médiatico judiciaire, Denis Barthe et Jean-Paul Roy, respectivement batteur et bassiste du quatuor bordelais fondent The Hyènes, tout autant pour s’accorder une bouffée d’oxygène dans ce climat délétère que pour répondre aux sollicitations scéniques qui font suite à la composition de la B.O. du film “Enfermés dehors” de leur ami Albert Dupontel. Ce projet, d’abord parallèle, s’inscrit dans la durée dès lors que l’aventure Noir Des’, en respiration artificielle, prend fin pour de bien sombres raisons. Sorti de son havre de paix landais, c’est à la Poudrière, lieu artistique par excellence situé dans le 11ème arrondissement de la capitale, que Denis Barthe, toujours aussi affable et responsablement engagé nous livre sa vision d’un monde en proie à une certaine déliquescence. Et souvenez-vous… « La hyène est un animal dont on ne parle jamais alors qu’être ami avec une hyène, c’est souvent plus important que d’être ami avec des vrais amis… » N’est-ce pas Bernie Noël ?! 

Cliquez sur l’image et retrouvez l’interview vidéo de Denis Barthe pour @agentsdentretiens

« Ne cherchez pas ce qui a tué Noir Désir, ce qui a tué Noir Désir, c’est les médias ! »


Nous sommes depuis peu dans une période compliquée avec de nouvelles mesures restrictives prises par le gouvernement pour faire face à la pandémie. Comment réagis-tu vis-à-vis de ces décisions qui restreignent nos libertés ?

Depuis l’apparition de la Covid, j’ai l’impression que tout est fait de manière empirique. Des interdictions viennent se poser sur d’autres interdictions sans que l’on remette tout à plat. On se soucie visiblement énormément du principe de précaution. Je me suis toujours posé la question quant à savoir si l’empire romain se serait soucié de ce fameux principe de précaution. On nous protège un peu trop contre notre gré. Il y a bien sûr une menace réelle pour les gens à risques, à la santé fragile ou âgés mais même si la Covid n’est pas un rhume, ce n’est visiblement pas non plus le virus Ebola.

On a l’impression quand même que, dans l’impossibilité de décréter un nouveau confinement national, le gouvernement prend des demi-mesures en fermant bars et restaurants à Marseille et les bars à partir de 22 heures à Paris comme si cela allait empêcher la propagation du virus !

Quand je viens sur Paris comme aujourd’hui, je fais le voyage en TGV pendant trois heures en face d’une personne que je ne connais pas, qui enlève son masque pour boire un café, qui touche le siège… Ça ne me fait pas plus peur que cela mais, en même temps, on se dit que, forcément, les mesures prises ne sont pas à même de stopper le virus. On assiste d’ailleurs en raison des restrictions imposées à la population à un effet curieux où, à Bordeaux par exemple, on commence à voir naître des restaurants, des bars et des concerts clandestins… J’habite dans les landes et ce que je trouve encore plus surprenant mais sympathique, ce sont les personnes âgées qui, comme pendant la guerre, organisent des bals clandestins le dimanche après-midi.

Penses-tu que, face à une mauvaise communication du gouvernement et des mesures jugées liberticides, les gens choisissent de braver l’interdit parfois au détriment de leur santé ?

On ne peut pas parler de mauvaise gestion de la crise de la Covid de la part du gouvernement car on ne sait pas trop comment nous aurions réagi face à une telle situation exceptionnelle ! Vu de l’extérieur, je pense en tout cas que certaines choses sont exagérées et d’autres négligées. Une de mes filles vit en Roumanie et, même si elle a été confinée d’emblée, on leur a dit que, désormais, c’était télétravail ou livraisons pour ne pas mettre à l’arrêt l’économie. En conséquence, 80% des commerces n’ont pas fermé et les entreprises ont, de fait, engagé énormément de livreurs ce qui a évité au pays d’être à genoux. En France, on est dans une sorte de fraction du tout ou rien.

Denis avant de monter sur scène à la Poudrière

C’est noir ou blanc mais jamais gris !

Exactement ! On a par exemple interdit de fumer dans les bars pour autoriser les terrasses chauffées et, maintenant, on décide d’interdire ces mêmes terrasses chauffées là où les bars et restaurants ont investi énormément. Construire pour déconstruire, c’est un truc typiquement français ! Ce que je vais dire est un lieu commun, mais j’ai l’impression que les technocrates font beaucoup de mal alors que l’on n’a personne pour aller sur le terrain et voir réellement ce qu’il se passe dans les entreprises comme dans la rue pour comprendre comment les gens qui se retrouvent avec de moins en moins de marge de manœuvre vivent. Les interdictions créaient d’autres voies qui, forcément, ne seront pas très raisonnables.

C’est vrai que, concernant la crise de la Covid, on était plutôt mal parti avec un gouvernement qui nous expliquait que le port du masque ne servait à rien pour cacher qu’en fait nous ne disposions plus d’un stock suffisant !

C’était stupide ! Si dès le départ on nous avait dit que le milliard de masques de Bachelot n’existait plus car il avait été détruit et que l’on avait incité les français à fabriquer leurs propres masques comme cela s’est fait à la fin du confinement, il y aurait certainement eu moins de soucis. Nous faire croire que les masques ne servaient à rien afin de passer sous silence une erreur qui avait été commise n’a pas été le meilleur moyen de faire passer un message clair. Comment voulez-vous après cela que les français puissent avoir confiance ? On a cette désagréable impression que le gouvernement ne veut pas dire les choses et voir réellement ce qu’il se passe. Quand la maison brûle, il vaut mieux appeler les pompiers ou aller chercher de l’eau que rester là à attendre de prendre feu ! Là, nous sommes face à un message très désordonné et bien souvent contradictoire d’un jour à l’autre. Soit la Covid est quelque chose d’extrêmement grave, il serait bien de nous le dire mais si ce n’est pas le cas, il faudrait desserrer un peu l’étau !

Pour revenir sur un terrain plus musical que sanitaire, peux-tu rapidement nous parler de la genèse de The Hyènes né après avoir composé la B.O du film d’Albert Dupontel « Enfermés dehors » ?

Un jour Albert m’appelle et me dit : « Je travaille sur mon prochain film et une partie de la B.O sera très rock, est-ce que ça te dit de la composer ? » J’ai bien sûr accepté. On a passé quatre ou cinq jours en studio et on s’est vraiment amusés. Au moment de signer la B.O, on s’est dit que mettre nos noms en rang d’oignon était un peu stupide et on s’est souvenu de la longue tirade d’Albert dans Bernie sur la hyène qui est un animal très important mais dont on ne parle jamais et hop, le nom du groupe était né. On pensait s’arrêter là et puis, à la sortie du film, on a commencé à recevoir des propositions pour des concerts. Là, j’ai dit aux autres : « Mais pourquoi ne fait-on pas comme lorsque l’on avait 18 piges et sans album, sans maison de disques, sans tourneur, on met le matos dans la voiture pour aller jouer ? » On a donc commencé par un concert, puis deux, puis trois et ainsi de suite. Alors, on s’est pris au jeu. Nous avons ensuite filé un coup de mains aux frères Cantona sur le rugby bordel football club puis à Emmaüs… C’était pour nous une grande récréation !

Le fait, comme tu le disais, de remettre le matos dans la voiture et partir sur les routes, c’était aussi un moyen de rompre avec les énormes tournées auxquels Jean-Paul et toi étiez habitués avec Noir Désir ?!

J’ai toujours dit : « Je joue s’il y a plus de gens dans la salle que sur scène ! » Là, en l’occurrence, il en faut cinq. J’adore les grands concerts, les festivals mais mon plaisir premier, c’est de jouer. On dit toujours : « On a fait un bon ou un mauvais concert ! » Mais le « on » est plus large que le groupe et englobe bien entendu le public. Si tu as deux cents personnes qui te regardent en étant passives, ce n’est pas du tout la même chose que deux cents personnes qui sautent partout et reprennent en cœur tes morceaux ! Le groupe est poreux du public et toute la durée du concert n’est qu’un jeu de ping-pong où les musiciens et le public se renvoient la balle.

The Hyènes est aussi un groupe tourné vers l’image puisque vous avez participé à un BD concert « Au vent mauvais ». Je suppose que lorsque l’on n’est plus lié qu’aux musiciens mais également à l’image on aborde le concert différemment ?!

On a appris beaucoup de choses avec ce BD concert que nous a proposé Thierry Murat. On a accepté sans trop savoir à quoi l’on s’attaquait. Le projet a couru plus vite que nous. Au départ, il était prévu de faire huit ou dix dates dans le réseau de la BD et, au final, on est parti pour 118 concerts et quatre ans. Normalement, avec The Hyènes, on peut changer la liste des morceaux, s’arrêter pour discuter avec le public… Là, pour un BD concert, c’est totalement différent car, sur l’écran, c’est « quatre, trois, deux, un, zéro » puis on part en immersion totale. On avait volontairement choisi de ne pas avoir de time-code et de se repérer à l’image. Tout était écrit mais chaque soir étant légèrement différent de la veille, on ne s’est jamais ennuyé. Nous avions choisi de jouer dans le noir afin que notre présence ne perturbe pas l’attention du public qui devait se focaliser sur l’image. Musicalement parlant, cela nous a permis de découvrir un univers tout à fait nouveau et le nouvel album de The Hyènes est forcément imprégné de cette expérience musicale et visuelle. On est tous des éponges. Ce que l’on vit dans la journée, on va le transcrire le soir en rentrant chez soi.

The Hyènes a été créé en 2005 alors que Noir Désir était en suspens pour les raisons que l’on connaît. À cette époque, avais-tu l’espoir que, malgré la tourmente, Noir Dés renaisse de ses cendres ?

Il était évident qu’avec Noir Désir si l’on avait pu refaire quelque chose, on l’aurait fait. Quand Albert nous a proposé la musique de son film, j’ai vu ça comme une respiration. Nous étions à l’époque dans des choses graves, désagréables. Du matin au soir, notre quotidien était extrêmement pesant. Là, j’ai vu une porte s’ouvrir et on a donc fondé The Hyènes comme on ferait un footing, histoire de s’aérer, par hygiène même. Il faut savoir que lorsque je ne joue pas, je suis un enfer. Je tourne en rond, je râle… Il n’y avait aucune ambition sur The Hyènes, donc aucune pression. Au moment où l’on s’est remis à répéter avec Noir Désir, on ne savait pas trop où cela allait nous mener et le fait est que, pour diverses raisons extramusicales légitimes, nous n’avons pas pu repartir pour une aventure commune. Quand je suis rentré chez moi le soir du split de Noir Désir que j’ai d’ailleurs eu la lourde charge d’annoncer, j’ai vraiment pensé poser mes valises et arrêter la musique. La réponse est venue de ma plus grande fille qui était petite à l’époque. Elle m’a dit : « Aujourd’hui tu es en colère, déçu mais tu vas tout envoyer balader alors qu’avec The Hyènes vous êtes sur le point d’enregistrer un deuxième album et que, sur scène, vous vous éclatez ! » J’ai réfléchi, j’ai réuni mes potes et là, on s’est dit qu’on allait poursuivre l’aventure de The Hyènes mais qui, de fait, n’allait plus être de la récréation mais quelque chose de plus sérieux.

Quand tu as débuté l’aventure Noir Désir, le monde de la musique était différent…

… Tout était possible. À Bordeaux, il y avait 25 clubs avec des concerts tous les soirs. Tu arrivais avec ta démo et le programmateur te disait : « J’ai de la place jeudi dans deux semaines ! » Bing, c’était parti ! On est aujourd’hui dans un monde où les possibles sont vraiment réduits. Sur le fronton des mairies est écrit : « liberté, égalité, fraternité. » La liberté, tous les jours on t’en éteint une petite. Et je suis intimement persuadé qu’il n’y a pas d’égalité, ni de fraternité, s’il n’y a pas de liberté. Donc, si l’on éteint la première, on éteint forcément les deux autres. Il ne faut pas lâcher un bout de liberté et attendre que l’on nous donne des choses. Il est primordial de les proposer et voir si oui ou non on nous les accepte. Notre liberté, historiquement, nous sommes allés la chercher. Notre gouvernement a un peu trop tendance à oublier que nous sommes un peuple de révolutionnaires. La révolution, c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas ! Avec les gilets jaunes, il y avait un espoir de changement. Attention, car quand on n’a plus rien à perdre, le désespoir est ce qu’il y a de plus dangereux. Avec le désespoir on ne se bat plus pour défendre ses droits mais pour détruire ce qu’il y a en face. Tu n’es pas obligé d’aller te battre, être engagé, être responsable, c’est déjà pas mal !  Un héros est quelqu’un de courageux capable d’un excès. Tentons de ne pas arriver aux excès ! Aujourd’hui, avec les mesures prises par le gouvernement par rapport à la Covid, des normes viennent se poser sur d’autres normes et s’empilent. On a l’impression que l’on est devant un énorme plat de lasagnes. Musicalement, nous aurions à mon sens besoin de ce qu’avait apporté la vague punk à l’époque. L’idée, c’était : On connaît trois accords, on monte sur scène et l’on joue en se foutant éperdument du business. À un moment, on a pensé que cela pouvait se passer à nouveau avec le rap. Malheureusement, 90% des rappeurs n’avaient qu’un truc en tête : le business. Ils se sont intéressés aux grosses bagnoles, au fric et aux culs des nanas !

Tu regrettes que notre société soit devenue bien-pensante et la liberté de parole de plus en plus mise à mal ?

Aujourd’hui, je me demande franchement ce qui n’est pas interdit. Tu n’as plus le droit de rien dire car cela dérange telle obédience ou telle minorité… Je suis désolé mais on est dans un pays où la liberté de ton, la liberté de parole devrait être la norme. Je me souviens qu’il n’y a pas si longtemps, on faisait des photos et j’ai mis mes doigts sur le coin des yeux, juste comme ça, sans y réfléchir, histoire se faire une grimace. Là on m’a dit : « Ah non, tu ne peux pas faire ça, c’est yellow face ! » J’ai demandé : « Mais c’est quoi yellow face ? » On m’a expliqué que je parodiais un asiatique et que cela pouvait être mal interprété. Il faut arrêter avec ce truc bien pesant. Un black est un black, un asiatique, un asiatique et moi une blanchette et il n’y a pas de soucis ! Tous ces trucs me dérangent. Je pars du principe que l’on peut tout dire et tout faire tant que cela n’insulte pas et ne met pas en danger autrui. Il faut respecter les différences tant que celles-ci ne tentent pas de prendre le dessus sur les autres. C’est comme la religion où certains se sentent obligés de défendre un Dieu. Un Dieu a-t-il franchement besoin des hommes pour se défendre et que ces derniers prennent des armes pour aller tuer leurs semblables ?

Tu te sens un peu en décalage avec cette société qui est la nôtre ?

Forcément ! Nous sommes dans une société foncièrement injuste. On nous explique que l’on a la parité hommes/femmes alors que la disparité de salaires reste la norme ! Il faudrait peut-être commencer par là. Je pense que la tolérance est quand même la base de tout. Je suis profondément athée mais quand un pote se marie à l’église, j’y vais en respectant les convenances du lieu dans lequel je me trouve.

L’arrivée massive d’Internet a modifié en profondeur la musique comme la communication où, sous couvert d’anonymat, les gens s’insultent via les réseaux sociaux !

Aujourd’hui, les gens mettent tout sur Internet. Leurs avis sur des sujets qu’ils ne maîtrisent pas, leurs déboires sentimentaux, la boîte de thon qu’ils viennent de manger… Je crois que ce monde aurait fasciné Andy Warhol qui pensait que toute personne avait droit à son quart d’heure de gloire. Dans 1984, Orwell avait pensé qu’un œil nous surveillerait tous mais il n’avait pas pensé qu’en fait tout le monde surveillerait tout le monde par le biais d’Internet. Il ne faut pas oublier que des ados ont dramatiquement mis fin à leurs jours car ils étaient harcelés et que certains ont dû faire face aux chantages de voir leurs photos intimes diffusées. Internet est, dans sa globalité, un truc génial mais empli de quartiers malfamés comme le prouvent les réseaux sociaux.

Je crois d’ailleurs que tu es fan de la BD d’Enki Bilal « Bug » que tu aimerais mettre en musique. Peut-on aujourd’hui imaginer un monde sans Internet ?

On ne peut pas l’imaginer mais, par contre, cela peut arriver. Il suffirait d’une tempête solaire et là, tout ce qui est électrique et électronique serait terminé. On repartirait alors quelques siècles en arrière ! Le prochain plus grand gangster n’aura pas un pistolet, il aura dans les mains une souris. Avec ça, il va éteindre des banques, rendre les marchés boursiers mondiaux fous et faire des transferts de fonds via les îles caïmans.

J’avais interviewé Serge Teyssot-Gay pour Agents d’Entretiens (ancien guitariste de Noir Désir) qui s’insurgeait du fait qu’aujourd’hui, en musique, les directeurs artistiques soient devenus des chefs de produits. On a l’impression que seul le côté mercantile compte au détriment de l’artistique !

Rien que dans le nom, c’est réglé ! Avant même de parler musique, on parle de rentabilité. Je vais te dire, avec la politique d’aujourd’hui, il n’y aurait pas eu de Gainsbourg, de Bashung, de Noir Désir, de Mano Negra… Des artistes qui ont été accompagnés sur deux ou trois albums avant de rencontrer le succès. Actuellement, au bout de trois ou quatre mois, si tu ne génères pas de profit, on te met de côté et on passe à autre chose. Notre société est celle de l’immédiateté. Mais avec ça, jamais on n’aurait connu Brel ou Aznavour dont, au départ, personne ne voulait. Eux ont eu la chance de tomber sur des personnes qui avaient une oreille musicale et une fibre artistique Aujourd’hui, la seule prérogative est de savoir comment en vendre le plus dans un délai compris entre trois et six mois !

Le nouvel album de The Hyènes

C’est la génération des artistes qui naissent sur la Toile, font un coup ou deux, puis disparaissent pour être remplacés par un autre !

Oui, tout est une question de « like » que l’on achète, de plan de com, d’omniprésence sur les réseaux sociaux… Aujourd’hui, il est quand même bien rare de rencontrer une personne qui te parle musique avant de te parler de contrat et de pourcentages !

Je crois que te concernant, ton arrivée dans l’aventure Noir Désir est un hold-up puisque tu n’étais pas batteur !

Effectivement ! Serge me dit : « On va monter un groupe et on cherche un batteur. Est-ce que cela t’intéresse ? » Je lui réponds que je suis partant alors que je n’ai jamais touché une batterie. Il n’empêche que déjà, à l’époque, lorsque j’écoute un morceau, je me focalise sur la batterie qui, pour moi, est l’horloge. Regarde, dès le matin, quand tu te réveilles, tout n’est que rythme jusqu’au soir où tu retournes dans le silence, sauf si tu ronfles !

Aujourd’hui, après toutes ces années, la musique continue à te nourrir et est l’élément moteur qui te fait aller de l’avant ?

J’ai l’impression que je vais bien, que je le fais bien et, en plus, que cela me fait plaisir… Alors je continue !

La musique est donc une forme de thérapie ?

Tout à fait ! La batterie m’a sauvé la vie. Quand j’ai arrêté le karaté, je suis rentré de plain-pied dans le monde de la musique qui était assez toxique. La nuit est un milieu qui peut facilement te détruire. Outre la batterie, l’autre chose qui m’a permis d’être encore vivant, c’est le fait d’avoir choisi de partir vivre à la campagne à la naissance de ma fille. Je ne pouvais décemment pas lui dire que papa rentrait de l’apéro à 4 heures du matin ! J’ai été champion du monde de la vie nocturne à Bordeaux. Je suis parti sur une victoire sans remettre mon titre en jeu ! La campagne, c’est un moyen de rester éloigné de la tentation. À Bordeaux, si tu m’appelais pour me dire qu’il y avait un concert, un anniversaire ou un apéro, j’étais là dans les dix minutes. Maintenant, il faut que je fasse cent bornes alors, forcément, ça calme ! La musique c’est le partage, l’échange comme avec The Hyènes où tout coule. Je me souviens avoir fait un concert avec Scorpions et, à la fin de leur prestation, chaque mec est parti séparément dans une voiture pour aller à l’hôtel. Le public était encore en train d’applaudir pour un rappel que les gars se trouvaient déjà à deux bornes dans leurs Audi avec chauffeurs. Moi, le jour où tu me vois faire ça, tu m’abats !

Quand on décide de partir de la ville, du monde de la nuit, des tentations et que, du jour au lendemain, on se retrouve sous les feux des projecteurs pour des raisons sombres et extra musicales, je suppose que cela laisse des traces ?!

On le vit mal mais, à la campagne, on est protégé. Tous les gens du village ont été géniaux et jamais un journaliste n’est parvenu à arriver jusqu’à moi. Je pense qu’ils sont encore en train de trainer dans les bois à droite, à gauche. Pendant l’affaire Noir Désir, la buraliste de mon village a été particulièrement courageuse en mettant Paris-Match et VSD à l’envers. Elle a d’ailleurs pris deux fois des amendes que j’ai voulu payer et elle m’a répondu : « Non, laisse ça me fait plaisir ! » Ne cherchez pas ce qui a tué Noir Désir, ce qui a tué Noir Désir, c’est les médias ! Après, juste retour ! Pendant 25 ans, on leur a dit qu’on n’avait pas besoin d’eux, qu’on ne voulait pas les voir. Bon et bien ils ont réussi à nous flinguer ! Merci les gars !

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