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Nicolas Mas, pilier de l’USAP et du XV tricolore

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Entretien100 % Catalan, Nicolas Mas porte sur les épaules depuis plus de dix ans les couleurs sang et or si chères à son cœur. Au sein de l’USAP, « le bus » a enchaîné deux finales du championnat de France en 2009 et 2010, avec le privilège de soulever le Brennus au Stade de France pour sa première participation. Clé de voûte de la première ligne du pack tricolore, Nicolas Mas reste également sur un grand chelem au dernier tournoi des six nations qu’il a d’ailleurs éclaboussé de son talent. À quelques jours d’une tournée préparatoire face notamment aux légendaires Australiens, le 27 novembre prochain à Saint-Denis, le pilier revient sur une carrière riche en rebondissements et fait le point à un an de la prochaine coupe du monde, objectif suprême des appelés du XV de France.


“À moins d’une catastrophe ou d’un réel désaccord avec le club, je pense sincèrement finir ma carrière à Perpignan »

Né à Perpignan, tu joues depuis 1999 à l’USAP. T’imagines-tu revêtir un autre maillot que celui sang et or Catalan ?

Par principe, il ne faut jamais dire jamais, mais à moins d’une catastrophe ou d’un réel désaccord avec le club, je pense sincèrement finir ma carrière à Perpignan. J’aime ce club et je me bats pour les valeurs qu’il défend. Nous avons au sein de l’USAP une belle ossature catalane et c’est plaisant de se retrouver dans un groupe composé de joueurs du cru. Personnellement, j’ai fait mes armes à Argelès-sur-Mer d’où je suis originaire et je suis toujours resté fidèle à mes racines catalanes. Le département qui fait beaucoup pour la formation des jeunes joueurs est un gros pourvoyeur de talents pour l’USAP. Cet esprit « rugby de clocher » me correspond bien même si je ne dénigre aucunement les joueurs qui changent de clubs au gré des offres. La carrière de rugbyman professionnel est courte et souvent pleine d’aléas et il est compréhensible que certains pensent à l’après-rugby.

Un titre de champion de France 2009, une finale en 2010 avec Perpignan et un grand chelem avec le XV tricolore. Quels défis souhaites-tu encore relever ?

Le rêve de tout rugbyman est de devenir champion du monde ! Alors, même si l’événement n’est que dans un an, forcément, j’y pense. Je crois sincèrement que l’équipe de France telle qu’elle est aujourd’hui a les moyens de gagner, ou du moins de rivaliser avec les grosses nations de l’hémisphère sud comme les Blacks ou les Bocks. Il y a une super entente entre tous les joueurs et le grand chelem gagné en 2010 a prouvé que, même dans l’adversité, on savait retrousser les manches pour se faire mal et gagner. Le match remporté contre l’Angleterre a été une sorte de déclic. Tous les gars se sont serré les coudes, personne n’a abdiqué et on a montré un esprit de cohésion extraordinaire. C’est un match référence qui va sans aucun doute nous servir pour les prochaines grosses échéances.

En 2010, tu réalises d’ailleurs un énorme tournoi des six nations, titulaire à tous les matches et élu meilleur joueur contre l’Angleterre. Tu restes pourtant assez discret. Tu aimes ce côté travailleur de l’ombre du première ligne ?

Ce trait de caractère n’est pas relatif à mon poste de pilier mais plus à ma propre personnalité. J’ai toujours préféré l’action aux longs discours. En plus, avec l’équipe de France, on se comprend tous très bien sans avoir besoin de parler et je pense que c’est un élément clé de notre force actuelle.

Dans moins d’un an aura donc lieu la prochaine coupe du monde. C’est donc ton objectif numéro 1 ?

Comme je te le disais, c’est un événement que tous les joueurs du groupe France et ceux qui peuvent y entrer ont en tête. C’est loin et en même temps très présent à l’esprit. On espère tous être en forme à l’instant T, éviter la blessure qui te prive d’un tel rendez-vous ! Le groupe se prépare pour cet événement et il faudra TOUT donner pour ne surtout pas regretter après. Remporter une coupe du monde, c’est un rêve de gosse et on donnera notre maximum pour y arriver.

Tu as connu des blessures qui ont failli mettre un terme à ta carrière. Comment as-tu géré ces moments difficiles ?

Deux hernies cervicales, ça laisse forcément des traces ! En 2002, j’étais assez jeune et j’ai plutôt bien géré la blessure. En 2005, ça a été plus compliqué. Pour un pilier dont le cou est l’outil de travail, ce type de blessure peut s’avérer fatal. À l’époque, j’allais avoir un enfant, je devais passer par une lourde opération et je savais que j’allais devoir repartir de zéro pour retrouver mon niveau. Franchement, j’ai pensé tout arrêter ! Ma femme, ma famille m’ont bien entouré tout comme le kiné, extérieur au club, et l’osthéo qui se sont très bien occupés du côté postopératoire. Ensuite, il a fallu travailler dur, très dur avec Olivier Barbier, le préparateur physique des blessés de l’USAP. Je ne te cache pas que pour le retour sur le terrain, l’appréhension était au rendez-vous lors des premiers matches. Heureusement, le sport reprend vite ses droits et on oublie la blessure.

Le rugby est un sport d’impact par excellence. Ne crains-tu pas les séquelles post-carrière ?

Je sais très bien que je ferai un mauvais vieux même si pour l’instant tout va bien. Et puis ma femme s’occupera de moi !

Quel est le suivi médical des joueurs lors de la saison ?

Les premières lignes doivent obligatoirement passer une IRM par an pour vérifier les vertèbres. C’est la seule chose disons obligatoire. Pour le reste, il y a trois kinés et deux médecins au club que l’on peut consulter si on le souhaite.

Peux-tu nous décrire une séance d’entraînement spécifique au poste de pilier ?

On a deux séances d’une heure et demie à deux heures par jour. En première ligne, le matin est surtout consacré à la musculation et à l’entraînement spécifique en mêlée avec un travail de joug. On bosse essentiellement l’impact à l’entrée ! L’après-midi, on travaille les touches et ensuite les enchaînements avec les trois-quarts. Pour les préparations aux matches, il y a également de grosses séances de vidéo où l’on analyse les séquences de jeu de l’équipe que l’on doit affronter. Les entraînements se déroulent tous les jours sauf le mercredi. Les lendemains de matches, c’est décrassage en piscine !

Que penses-tu des nouvelles règles concernant la mêlée et le fait qu’aujourd’hui, tout se joue à l’impact ?

Ce n’est pas franchement facile de se mettre au diapason ! Les règles en mêlée ont changé deux années de suite et je t’avoue que lors des premiers matches de la saison en Top 14, c’était très folklo. Les joueurs tout comme les arbitres étaient un peu perdus. Personnellement, cette nouvelle règle n’est pas trop ma tasse de thé. Aujourd’hui, tout est dans la vitesse d’exécution et dans l’impact lors de l’entrée en mêlée. La poussée franche n’existe presque plus et le rôle du première ligne est assez éloigné de ce que l’on apprenait à l’école de rugby. Il faut s’adapter, mais franchement ce n’est pas toujours évident !

Ton coéquipier et cousin Jérôme Schuster est appelé à tes côtés pour la tournée de préparation de novembre contre des équipes de l’hémisphère Sud. Je suppose que c’est une grosse satisfaction !

Je suis très heureux pour lui car il a énormément travaillé pour en arriver là. Deux Catalans et en plus cousins sélectionnés en première ligne, cela fait super-plaisir ! Je vais laisser Jérôme découvrir l’ambiance particulière de l’équipe de France en évitant de jouer les guides. Une première sélection, c’est toujours un moment très fort et à part qu’il faut savoir apprécier seul !

On connaît l’importance du mental dans tous les sports, et dans le rugby en particulier, les motivations à l’ancienne dans les vestiaires, ça existe toujours ?

La motivation à l’ancienne à tous les matches, ce n’est plus possible ! Avec le rythme des compétitions, si on devait se taper la tête contre les murs des vestiaires avant chaque rencontre, il y a bien longtemps que je serais devenu fou. Mais, effectivement, parfois, lorsque l’enjeu est très important, il faut retrouver un peu de ces valeurs d’antan du rugby, un côté guerrier qui fait du bien. Là, on reprend les bonnes vieilles motivations des premières lignes de l’époque. On se rentre dedans, on se cogne tête contre tête et on part au combat. J’ai connu le passage au professionnalisme dans le rugby alors, j’ai pris ce qui me semblait bon dans les deux écoles.

Le rugby, malgré la professionnalisation, semble garder ses spécificités (respect des règles, de l’arbitre, de l’adversaire, du public) C’est inhérent à ce sport, ou le risque de dérive existe ?

Franchement, ce sport est basé sur des valeurs qui ont traversé le passage au rugby pro et elles ne bougeront jamais. Un épisode comme celui de Domenech lisant une lettre des joueurs est simplement impensable dans le rugby !

On ne parle pas de dopage dans le rugby, c’est un sport épargné ?

Il y a des contrôles inopinés sur des joueurs tirés au sort à chaque journée du Top 14, sans compter les compétitions internationales. Franchement, si le dopage existait dans le rugby, il serait impossible de passer à travers les mailles du filet. Alors, oui, notre sport est épargné par ce fléau !

Si on te demande de poser pour le calendrier du Stade Français, tu acceptes ?

Je n’accepterai pas parce que cela ne me correspond pas et que je ne pense pas avoir le profil pour faire partie du casting !


Jean-Éric Ougier, pyrotechnicien

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